Le secrétaire général de la tutelle scolaire nous livre un témoignage.

De 21 février 2022 Abonnés
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Témoignage

Un enseignant a croisé leur route, et leur vie en a été transformée. Ils nous racontent…

« Elle était Juste parmi les nations »

Au Centre de formation pédagogique de la rue de Sèvres, à Paris, Yvan Kerloc’h suit les cours de philosophie de Germaine Ribière.
Le futur secrétaire général de la tutelle des Sœurs de Saint-Joseph découvrira plus tard qu’elle était une héroïne de l’Histoire !

[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row][vc_row type= »in_container » full_screen_row_position= »middle » scene_position= »center » text_color= »dark » text_align= »left » overlay_strength= »0.3″ shape_divider_position= »bottom »][vc_column boxed= »true » column_padding= »no-extra-padding » column_padding_position= »all » background_color_opacity= »1″ background_hover_color_opacity= »1″ column_link_target= »_self » column_shadow= »none » column_border_radius= »3px » width= »1/1″ tablet_width_inherit= »default » tablet_text_alignment= »default » phone_text_alignment= »default » column_border_width= »none »][vc_column_text]En 1983, à 19 ans, je suis admis au Centre de formation pédagogique Pierre Faure de la rue de Sèvres, à Paris, pour devenir instituteur. Notre promotion compte trente-trois élèves et je suis le seul garçon. Mademoiselle Ribière est notre professeur de philosophie. C’est une petite dame de 66 ans, ridée et à la voix éraillée. D’une mise un peu désuète, elle porte loden vert et béret. Au-delà des apparences, je sens en elle une vivacité et une détermination que je ne m’explique pas. C’est une femme très érudite : elle parle hébreu, évoque souvent la « ruah » qui désigne la force divine qui émane de Dieu et insuffle une haleine de vie. Elle s’emporte aussi lorsque resurgit l’antisémitisme et on perçoit alors en elle une colère sourde. Elle est un peu chahutée par mes camarades, mais pour ma part, c’est bien le seul cours que je suis assidûment. Je l’interpelle, mon intérêt grandit pour son enseignement et je crois qu’elle m’aime bien. J’habite alors une chambre de bonne sous les toits. Mon amie est à Bordeaux, je suis d’humeur mélancolique, je me sens très seul. Un soir de cafard, je cherche son numéro de téléphone et j’appelle. Elle m’accueille dans son appartement envahi de livres, près de la tour Montparnasse. Je lui parle de mes études bordelaises chez les jésuites à Tivoli et elle me confie avoir connu Teilhard de Chardin. Cela m’intrigue… Cette rencontre renforce notre estime mutuelle et l’attention qu’elle me porte. En fin d’année, elle prendra ma défense et empêchera mon renvoi du CFP à cause de mes résultats médiocres.
Vingt ans plus tard, je désire la revoir et entame des recherches. Je découvre sa nécrologie publiée dans Le Monde : elle est décédée à 82 ans en 1999. Se révèlent à moi des pans de sa vie qu’elle avait toujours tus : Germaine Ribière était Juste parmi les nations ! Très tôt engagée dans l’Action catholique avec le père Chaillet, elle rejoint le réseau Combat et sera une grande résistante. Elle sauve et cache des centaines d’enfants juifs. Héroïque et intrépide, elle déjoue à Lyon une souricière tendue à des juifs : déguisée en femme de ménage, elle prévient chaque personne afin qu’elle ne tombe pas entre les mains des nazis. En 1953, elle jouera un rôle décisif dans l’affaire Finaly, du nom des deux frères juifs cachés à Grenoble par des institutions catholiques les ayant baptisés puis refusant après la guerre de les rendre à leur famille survivante. Avec la confiance de l’Église catholique et de la communauté juive, Germaine Ribière ira récupérer Robert et Gérald Finaly dans un couvent du Pays basque espagnol pour les remettre à leurs proches. Je regrette aujourd’hui de n’avoir pu lui dire ma gratitude et ma reconnaissance pour m’avoir aidé à devenir ce que je suis. Elle serait heureuse de me voir occuper une mission au service des chefs d’établissement de mon réseau, qui demande écoute, discernement et ténacité. Une mission en cohérence avec ce qu’elle était. Comme elle, je mets mes pas dans ceux du Christ serviteur. En 2015, je suis allé avec ma femme à Yad Vashem1, à Jérusalem. Un olivier qui porte son nom y est planté. J’ai pu m’y recueillir et enfin remercier Germaine Ribière pour ce qu’elle m’a transmis. 1

« Comme elle, je mets mes pas dans ceux du Christ serviteur»

Propos recueillis par Noémie Fossey-Sergent – ECA n° 403 juin-juillet 2021.

1 Institut international pour la mémoire de la Shoah[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row]

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