Abraham : la vie, la mort

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Genèse 18, 1-2.

Hospitalité d’Abraham, qui accueille les trois messagers divins
(« les trois anges »)

En bas, à gauche, le « chêne de Mambré ».

À droite, Gn 18,6, Abraham prie Sara de vite préparer le repas
(Vérone, portail de saint-Zenon)

[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row][vc_row type= »in_container » full_screen_row_position= »middle » scene_position= »center » text_color= »dark » text_align= »left » overlay_strength= »0.3″ shape_divider_position= »bottom »][vc_column column_padding= »padding-2-percent » column_padding_position= »all » background_color= »rgba(179,188,191,0.08) » background_color_opacity= »1″ background_hover_color_opacity= »1″ font_color= »#000000″ column_link_target= »_self » column_shadow= »none » column_border_radius= »5px » width= »1/1″ tablet_width_inherit= »default » tablet_text_alignment= »default » phone_text_alignment= »default » column_border_width= »none »][vc_column_text]ABRAHAM DANS LA LUMIERE : il entend la promesse. Abraham dans l’ombre : Pharaon lui prend Sara. Puis, nouvelle étape, aux chênes de Mambré : « Il est assis à l’entrée de la tente dans la pleine chaleur du jour. » Il a plus de cent ans, sa femme est stérile. Mais c’est le plein midi et la promesse d’un fils va se réaliser. Surprise : la tradition des Églises d’Orient désigne la scène par le terme grec de « philoxénie (inspiré par He 13,2), qui veut dire « amour de l’étranger Nous saisissons vite que « philoxénie »  est le contraire de « xénophobie ». « Il leva les yeux et aperçut trois hommes devant lui. Il ne les a pas vus venir, il ne les connait pas. Des étrangers. Il vaut la peine de faire le compte des détails de l’hospitalité d’Abraham (comment il annonce du « pain » et fait tuer un veau, etc.).

Indiscutablement pourtant, cette philoxénie est la première Annonciation de toute la Bible. Et le fils annoncé est la promesse d’une grande nation. La nation sera bénie par des étrangers, or il est annoncé par des étrangers. On commente sur la proverbiale hospitalité des nomades, avec raison. Que cela ne détourne pas notre attention de cette association fulgurante entre ouvrir sa porte à des étrangers et recevoir un fils. Le fils, la fille : étrangers pour le père, la mère. Étranger, c’est-à-dire autre, nouveau. Nouveauté devant laquelle tout père, toute mère, se surprend en défense.

Abraham n’est pas seul. Sa vie se jouera sur son rapport avec les Nations (Gn 12,2-3). Ses visiteurs n’ont pas de nationalité. Leur statut est caché quand ils parlent, on entend tantôt leur voix (Gn 18,9), tantôt la voix du Seigneur (Gn 18, 10 et 13). Trois dimensions s’étagent :

  1. recevoir des étrangers ; 2. recevoir un fils ; 3. recevoir cet étranger Dieu. Un étranger qui partage nos repas : « Ils mangèrent et lui dirent « Où est Sara, ta femme ? » ». L’annonce d’un fils fait rire Sara, rire devant l’impossible. Pas impossible pour le Seigneur, lui est-il répondu Saint Luc, intentionnellement, nous fera ressouvenir de cette scène. Gabriel adressera la même parole à Marie : « Rien n’est impossible à Dieu » (Le 1,37). Mais il y a des degrés dans l’impossible.

Mambré et Sodome la première Annonciation de la Bible est inséparable de la scène qui la suit (Gn 18, 16 à 19, 29), et qui est inaugurée par un mot. « Sodome » (Gn 18,16 ; cf. plus loin : Sodome et Gomorrhe). C’est un choc ! L’effet de contraste s’inscrit dans la composition soignée des chapitres 18 et 19, sous le signe de la « visite », visite accueillie par Abraham, visite refusée par les gens de Sodome qui se jettent sur les nouveaux venus comme sur leur proie. Cette lecture est corroborée par le Nouveau Testament. Par deux fois, Jésus compare à Sodome et Gomorrhe les villes qui refusent la « visite » de Dieu, en le refusant, lui ou ses envoyés (Mt 10,15 ; 11,23-24). « Ange » en hébreu, se dit « messager », « envoyé ». Les prophètes sont allés jusqu’à appliquer cette même comparaison à Jérusalem (Is 1,10 ; Ez 16). Aujourd’hui, toutefois, ces apostrophes nous évoquent aussitôt les pratiques et comportements sexuels associés à Sodome et Gomorrhe. Or la tradition de la Bible est constante : ces deux cités symbolisent d’abord autre chose. Elles évoquent la fermeture sur soi, qui se relie à la satiété des biens et engendre la violence. Le pays de Sodome est caractérisé par l’opulence (Gn 13,10). Pour Jérémie, Moab (lié à Sodome cf. Gn 19,30-37) « reposait sur sa lie, n’ayant jamais été transvasé » (Jr 48,11). Ez 16,49 trace l’image complète de « ta sœur Sodome : orgueilleuse, repue, tranquillement insouciante […], mais la main du malheureux et du pauvre, elle ne la raffermissait pas. Elles sont devenues prétentieuses et ont commis ce qui m’est abominable ». La lettre aux Romains explicitera ce que l’apôtre Paul désigne comme « abominable » dans l’ordre sexuel (Rm 1,26-27), mais ce sera pour y voir la phase ultime d’une série de fermetures, un symptôme corporel d’une résistance plus profonde, cachée, On a souvent remarqué la douloureuse contradiction de cet élan à la fois corporel et contraire à l’humilité du corps, puisque c’est l’« ange » (l’image idéale de l’autre) qu’il veut atteindre : telle est la vraie dimension du problème. Ce symptôme est l’émergence d’un système. Or les textes cités ne l’imputent pas à des individus mais aux choix adoptés par une civilisation. En cela, saint Paul est fidèle à l’attitude des prophètes et de Jésus qui compare entre elles des villes, non des personnes. Cela dit, l’épisode des chênes de Mambré dit où est la vie, l’épisode des villes détruites dit où est la mort. Le diptyque est celui du Jugement.

Même envers Sodome et Gomorrhe, Abraham reste l’élu pour tous, le béni pour ceux qui bénissent. Jamais il n’a été si proche des Nations qu’a ce moment où, raccompagnant les visiteurs étrangers jusqu’à ce haut lieu d’où leur apparaissent les deux cités, commence le dialogue au cours duquel Abraham intercède si astucieusement pour Sodome et Gomorrhe auprès du Seigneur. Combien de justes faudrait-il pour qu’elles soient sauvées : cinquante, quarante-cinq, quarante, trente, vingt, dix ? On s’est demandé pourquoi Abraham n’allait pas jusqu’au chiffre « un » Peut-être parce qu’il faut une alliance entre plusieurs justes pour sauver la cité « Il n’est pas bon que l’homme soit seul », a dit le Créateur (Gn 2,19).

Extrait « 50 portraits bibliques »  Paul Beauchamp, Editions du Seuil

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